vendredi 26 avril 2019

Une mère, un père, deux récits

J'ai lu dernièrement deux livres sur le handicap, deux récits très différents, qui m'ont touchée chacun à leur façon.


Le premier, vu et raconté par une mère, Marie Garnier. J'ai eu le plaisir de la rencontrer au Salon du livre à Monistrol, dernièrement. Beaucoup de courage, d'abnégation et d'amour dans ce récit. Elle a également écrit de très belles histoires pour les enfants dont "Le papillon à roulettes". Et bien d'autres, si vous voulez aller voir sur son site, c'est ici : Marie Garnier

Le nid des papillons
« Un matin semblable à tous les autres, ou presque, je ne le sais pas encore, c'est pour aujourd'hui.
Je m'apprête à vivre l'une des journées les plus merveilleuses de la vie d'une femme, je vais être maman.
Cette journée va pourtant tout bouleverser, plus de repaires, plus d'avenir, plus de passé.
Me voilà projetée dans cet univers décalé sans y être préparée, sans même avoir conscience qu'il existait.
J'ai peur !
Que vais-je devenir ?
Que va-t-elle devenir ?
J'ai longtemps cherché comment construire le combat qu'il me fallait mener, pour toi ma fille, pour ton présent, pour mon passé, pour ton futur, pour ton identité. »
_________________________


Et puis le second livre, vu et raconté par un père. Récit écrit sur le ton caractéristique de Jean-Louis Fournier, mélange d'humour, d'ironie et de dérision. J'ai eu un peu plus de mal à le lire, le côté "dérision" sans doute, qui m'a fait mal à certains moments. Mais pourtant, comme il les aime ses garçons...

Où on va, papa ?
« Jusqu'à ce jour, je n'ai jamais parlé de mes deux garçons.
(...)
Aujourd'hui que le temps presse, que la fin du monde est proche et que je suis de plus en plus biodégradable, j'ai décidé de leur écrire un livre.
Pour qu'on ne les oublie pas, qu'il ne reste pas d'eux seulement une photo sur une carte d'invalidité.
(...)
Grâce à eux, j'ai eu des avantages sur les parents d'enfants normaux.
Je n'ai pas eu de soucis avec leurs études ni leur orientation professionnelle.
Nous n'avons pas eu à hésiter entre filière scientifique et filière littéraire.
Pas eu à nous inquiéter de savoir ce qu'ils feraient plus tard, on a su rapidement que ce serait: rien.
J'espère quand même que, mises bout à bout, toutes leurs petites joies auront rendu le séjour supportable. »

10 commentaires:

  1. Toujours émouvant de lire ces témoignages...
    Moi, j'avais été très émue par ce livre de Anne-Dauphine Julliand (
    Deux petits pas sur le sable mouillé
    "Tout commence sur une plage, quand Anne - Dauphine remarque que sa fille marche d'un pas hésitant. Après une série d'examens, les médecins découvrent que Thaïs est atteinte d'une maladie génétique orpheline. Elle vient de fêter ses deux ans et il ne lui reste que quelques mois à vivre. L'auteur lui fait alors une promesse : " Tu vas avoir une belle vie. Pas une vie comme les autres, mais une vie dont tu pourras être fière.
    Et où tu ne manqueras jamais d'amour. "

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    1. Je ne connais pas ce livre, Marie, merci d'en avoir parlé, je note le titre.
      Oui, c'est toujours émouvant de lire ces témoignages.
      Belle fin de journée à toi.

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  2. Bon ! Tant pis je me lance. Ça ne va pas plaire, mais ma vérité à ses droits :
    :
    — d'une part je n'ai jamais lu ce genre de livre et n'en lirai JAMAIS.
    — D'autre part, je n'aurais pas supporté, mais vraiment pas supporté, que mon père ou ma mère ait se soit autorisé(e) à écrire un livre pour raconter mon histoire « De pauvre petit garçon qui n'est pas comme les autres ». J'aurais vécu cela comme une traîtrise violente ! Il est même probable que je les aurais détestés.
    Faire larmoyer dans les chaumières avec ma propre vie ! Quelle honte !
    C'est pour moi une sorte de viol d'enfance que d'étaler tout ça. Et le ou les gosses handicapés ? On leurs a demandé leur avis ? Ils ont signé le Bon-à-tirer ?

    Voilà voilà, c'est dit…

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    1. Bien sûr que ta vérité a ses droits, Alain, et tu as bien fait de pousser ce coup de gueule. C'est vrai que l'on ne demande jamais l'avis des intéressés, je n'avais pas pensé à cela.
      Et ce que tu dis me fait me questionner...
      Mais alors, désapprouves-tu lorsque je parle de Noé sur mon blog, lorsque je raconte ses progrès, ses soucis, et tout le reste ?
      Peut-être que ce n'est pas très bien pour lui, en fait...

      Je ne pense pas que les personnes qui écrivent ces livres le font pour faire larmoyer dans les chaumières, je pense qu'elles sont bien souvent démunies et que le fait d'en parler, de le partager, les aident beaucoup. Et les personnes touchées par ce problème et qui lisent ces livres, se sentent moins seules également. Ma belle-fille lit beaucoup ces livres, cela l'aide à comprendre, cela l'aide tout court.
      Mais bien sûr, on ne demande pas l'avis aux enfants, je suis d'accord...

      Merci pour ce coup de gueule qui me fera peut-être raisonner différemment à l'avenir...

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    2. Tu penses bien, chère Françoise, que j'ai pensé aux billets ou, parfois, tu évoques Noé et ton vécu par rapport à lui. Pour moi c'est vraiment d'une autre nature. Un blog, même s'il est public, très concrètement reste largement confidentiel. Nos blogs n'ont pas des millions de lecteurs ! On ne passe pas à la télé pour venir vendre et faire la promotion d'un bouquin dont le sujet est son propre enfant handicapé dont on est parent, grands-parent ou autre.

      Alors certes, un témoignage dont on fait la promotion et la publicité peut avoir sa légitimité. Mais je garde beaucoup de réserves lorsqu'il s'agit d'enfants. Si les auteurs de ces livres ont besoin de partager, d'être soutenu ou aidé dans la situation, il y a bien d'autres moyens pour se faire que d'écrire des bouquins, surtout lorsqu'on est déjà un auteur célèbre !
      Qu'ensuite, la personne concernée, écrive elle-même sa propre histoire de vie et ses avanies, c'est un acte délibéré volontaire de celui qui a eu à subir « tout cela ». Je l'ai fait moi-même ! Mais je n'autorise quiconque à parler « à ma place » sur la place publique… (et un blog n'est pas à proprement parler la place publique, ou alors c'est une toute petite place dans un village de montagne perdu, où ne se rendent que quelque dizaines de personnes !!…)

      Reste que chacun a la faculté d'exprimer ce qu'il désire et ce qu'il ressent. Cette même faculté est offerte aux lecteurs. Cela s'appelle la liberté d'expression et de débattre. Tant mieux ! Je n'ai fait qu'émettre un point de vue tout personnel.
      Et c'est toujours avec grand intérêt et affection que je lis tes billets à propos de ta relation à Noé.

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    3. Oui, bien sûr, sur les blogs nous sommes un peu entre nous en quelque sorte, c'est différent. Il s'agit d'échanges, de partages, de besoins de soutien aussi parfois. Mais quoiqu'il en soit, je ne blâmerai jamais quiconque (et de quel droit d'ailleurs ?), car nous ne sommes pas à la place des autres et n'avons pas à juger, nous ne connaissons pas leur histoire.

      Merci de lire avec grand intérêt et affection les billets que je consacre à Noé, tu sais combien cela me fait plaisir et me touche également.
      Bonne soirée, Alain.

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  3. Parfois, souvent, quand ils le peuvent, ce sont d'anciens enfants en situation de handicap qui écrivent et il me semble que cela leur est fort utile.
    Parfois, le handicap est tel qu'ils ne pourront pas, mais dicteront implicitement à leurs parents et approuveront ensuite.
    Parfois, les parents ont besoin d'écrire ce qui fait leur vie, leurs joies, leurs souffrances, leurs espérances, leurs désaccords aussi. Cela sert également une cause qui semble bien nécessiter une défense éternelle : celle de la différence, du "vivre ensemble" cette tarte à la crème actuelle, la cause des enfants-élèves-familles que j'ai accompagnés durant une vie professionnelle et dont on se moque encore subrepticement dans les rangs, sournoisement dans la cour de récréation, qu'on regarde par en-dessous sur le trottoir quand on n'en change pas...

    Faudrait-il qu'on leur accorde le droit à l'indifférence ?
    Peut-être, mais pas sans de sérieuses garanties !

    Le témoignage de Jean-Louis FOURNIER, dont c'est le métier, m'a fait rire... aux larmes autrefois.

    NB - le sujet est riche et passionnant. L'espace d'un blog et des commentaires est un peu "étroit" pour échanger sereinement... mais nous le faisons, ou l'avons fait ailleurs aussi bien sûr.

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    1. Alexandre Jollien écrit des livres sur lui, parle de son handicap ; j'aime le lire, encore plus bien sûr depuis que j'ai un petit-fils handicapé. Ses livres ne sont pas tristes, ils expliquent ses ressentis, ses difficultés, ses joies, et ceci avec toujours beaucoup d'humour. Alexandre Jollien parle également de ses parents qui l'ont beaucoup aidé en ne le surprotégeant pas. Et il aborde tout plein de sujets tous aussi intéressants les uns que les autres.
      J'ai beaucoup aimé son livre : "Eloge de la faiblesse".

      Merci pour t'être exprimé à ce sujet, Francis, ce que tu dis est fort intéressant.
      "Faudrait-il qu'on leur accorde le droit à l'indifférence ?"
      Oui, à méditer...

      Mais personne n'est identique, et chacun réagit à sa façon, en fonction de son vécu, de son histoire et de sa sensibilité propre. L'important est d'échanger sereinement, comme tu le dis, et c'est ce que nous faisons.

      Belle fin de dimanche à toi. Au plaisir de te lire.

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    2. Bonjour Francis,
      je suis un de ces « anciens enfants en situation de handicap », qui a connu la situation d'exclusion en raison même de ce handicap. (Enfin, ancien… je suis toujours un vieux en situation de handicap…)
      On retrouve sa place… si on la prend. Attendre qu'on nous la donne est totalement illusoire. Je ne parle ici que de ma modeste expérience.

      Le droit à l'indifférence ? C'est une question intéressante… en plus de 50 ans de handicap, je suis témoin de bien des évolutions… plutôt positives. Mais on est loin du compte ! Le vivre ensemble suppose de surmonter des peurs. L'autre est un inconnu qui fait peur. Et donc, surmonter des peurs suppose un vivre ensemble… Résoudre cette équation complexe n'est pas encore vraiment achevé…!
      En ce domaine je préfère aujourd'hui qu'avant. En particulier dans les relations interpersonnelles. Au niveau sociétal, comme on dit maintenant, nous aurions tendance à régresser par lenteur, dans un monde qui a élevé la rapidité en vertu, la croyant synonyme d'efficience.
      Le cynisme capitaliste est simple : comment peut-on faire en sorte qu'une personne en situation de handicap, soit aussi productive que la personne personne qui ne l'est pas, mais ne va pas tarder à le devenir à force d'être exploitée par ledit système…
      (juste quelques propos dans l'espace restreint d'un blog, comme vous le soulignez… et en tout cas merci pour la vie professionnelle que vous évoquez. Vous avez œuvré pour améliorer le « vivre ensemble ». Je vous en suis infiniment reconnaissant.)

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    3. Alain, j'aurais un immense plaisir à partager un grand moment d'échanges avec vous. Je pense aussi que nous vivons des évolutions positives (enfin !), mais aussi que la vigilance sera toujours nécessaire. Des évolutions positives... certaines entreprises américaines du domaine du numérique notamment ont bien compris quels intérêts elles pouvaient tirer du travail de personnes étiquetées "troubles autistiques" (mémoire et persévérance, aptitude aux détails...)... "aussi productives", non ; bien plus productives !
      Au cas où vous en ayez le temps et l'envie, j'ai écrit quelques pages sur le sujet de la scolarisation ici, dans un blog aujourd'hui entre parenthèses et dont ce n'était pas du tout l'objet principal : http://f6mig.canalblog.com/archives/histoires_d_ecole/index.html
      Je passe parfois vous lire aussi, mais commente peu...
      Amitiés

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Merci pour vos petits mots que j'apprécie infiniment.

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